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Ça commence mal.
Savez-vous ce qui n’a pas manqué à Kat, quand elle s’est Réveillée et que le Monde d’Avant n’existait plus ?

Les moustiques.

Mais eux, malheureusement, existent encore.

Et ces petites bêtes bourdonnantes, non contentes de l’empêcher de dormir et de la vider de son sang pour se repaître, sont aussi toujours vecteurs de maladies.

Kat a bien cru qu’elle y passerait.

Le calendrier était déjà flou, mais il est devenu carrément imaginaire. Les excès de fièvre ont avalé le temps et distordu l’espace. Impossible de savoir depuis combien de temps elle flotte dans cet état semi-comateux. À chaque réveil, elle se redemande où elle est, ne reconnaissant plus les rondins qu’elle a pourtant liés entre eux avec l’aide d’Angel, surtout quand la nuit transforme tout. À chaque fois, la même panique et la même solitude. Elle qui a toujours été si entourée, qui s’est si souvent occupée des autres, qui jamais n’aurait imaginé n’avoir personne à son chevet dans ses derniers moments (ou du moins, dans sa maladie, maintenant qu’on ne dirait plus qu’elle va mourir). Alors que son corps brûlait il n’y avait personne, ni pour passer un linge mouillé sur son front, ni pour la bercer d’une chanson, ni pour pencher un verre à ses lèvres desséchées.

Elle a à peine eu l’énergie d’avaler un peu d’eau par moment et ne mange rien depuis… va savoir. Des jours ? Des semaines ? Quand elle a assez de force, elle se force. Quelques arachides, des feuilles qu’elle mâche sans les cuisiner. Elle a pioché dans ses réserves, mais les fruits ont tourné et elle n’a pas pu retourner en cueillir. Ça pue. Elle attrape ce qui est à portée de main, croque, se rendort.

Sa conscience revient à présent, mais elle se sent extrêmement faible. Elle sait qu’il faut quand même qu’elle se déplace ou elle mourra de faim plutôt que de maladie, mais l’idée de faire trois pas à la suite lui donne le tournis. Elle pleurerait si ses yeux le pouvaient, mais ils sont aussi secs que sa gorge.

Elle inspire. Elle expire. Elle inspire. Elle expire. Elle inspire. Elle expire et pousse sur ses bras pour se relever et reste assise un moment. Puis elle se traîne jusqu’à l’entrée et commence à descendre l’échelle de sa cabane. Un barreau. Puis un barreau. Puis un barreau. Puis un barreau.

Et puis des petits points blancs et noirs commencent à apparaître en périphérie de sa vision et elle laisse échapper un cri rauque, sachant ce qui l’attend mais ne pouvant rien faire pour l’en empêcher : les points accélèrent d’un coup et s’engouffrent partout pour envahir l’entièreté de sa rétine. Quand Katell lâche le barreau, elle a déjà perdu connaissance. Elle ne sent pas la surface de l’eau quand son corps la crève, sur le dos, avant de flotter un peu plus loin.

Heureusement, l’eau est assez profonde pour qu’elle ne se blesse pas.

Et heureusement (espérons-le, du moins), sur la rive se dresse une silhouette humaine qu’elle n’a pas eu le temps de remarquer.
Katell
⚘ Bouquet d'orties
Katell
Katell
Mer 6 Sep - 12:24
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Tu pourrais vivre éternellement toi?

Basile avait roulé sur le côté, un peu comme un hippopotame ou comme un gros cachalot échoué que les vagues poussent le sur rivage. La clope au coin des lèvres, l’esprit alourdit de substances moyennement approuvées, elle regarda Kenza, assise en tailleur, les yeux grands ouverts sur un épisode infiniment rediffusé de Bob l’éponge.

Hein?” Elle n’était pas bien certaine d’avoir bien compris - quand elle était high, Kenza partait vraiment dans tous les sens, et elle se tapait de ces crises de l’existence à écrire le monde. C’était dur de s’accrocher, et à ce moment-là, elle n’avait ni l’envie ni l’énergie de se lancer dans une conquête biblique des lois philosophiques qui dictaient le monde. “Franchement, bof.

Moi je pourrais pas. Je pense que la mort, ça a du bon. Et puis, c’est un peu un combat. Si tu réussis à la battre, ça aura un goût de victoire après.”

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Sa mère.” Basile regardait son pied à moitié enfoncé dans la boue. Son visage était distordu par une grimace dégoûtée en voyant la bouillase noirâtre se faufiler entre ses orteilles. Pas une semaine qu’elle était levée, et elle s’adaptait déjà mal à son nouveau quotidien.

Faut faire des efforts!” lui aurait dit sa mère. Oui, mais voilà. Les efforts ça n’a d’intérêt que si c’est volontaire. Et en sevrage de sa vie d’avant, l’humeur exécrable, en manque de nicotine, de sa famille, de netflix, de tout, Basile n’y mettait pas du sien. Elle haïssait tout de son nouveau quotidien. La nature lui paraissait plus lointaine que jamais, son jardin secret un vaporeux souvenir, et ses besoins de poisons plus hurlant que jamais.


Putain… De mon temps, il y avait les patchs.” Elle sonnait comme une grand-mère aigrie, mais elle commençait sincèrement à croire que c’était ce qu’elle était devenue. Machouillant le filtre de sa toute première cigarette du renouveau - il ne ressemblait plus à grand chose - elle avant le long de la berge à la recherche de n’importe quoi - racine, feuille, minéral - qui pourrait lui être utile.

Puis il y eut un ploc. Enfin, pas vraiment un ploc. Plutôt un enchaînement de ploc un peu douloureux, et un gros splash. Trop gros pour just être un caprice de la nature. Elle leva brusquement son regard vers la petite rivière. Il y avait une masse, dans l’eau. Un animal? Non, c’était trop humain. Humain? Merde!

Un autre survivant; Sans trop savoir si elle était contente ou blasée, Basile eu la réaction de n’importe quelle chat, c’est à dire aucune à première vue, préférant jaugé du danger immédiat et de sa propre propension à donner un coup de main. Mais elle n’était pas méchante, Basile. Enfin, pas trop. Elle avait un bon fond - qu’elle montrait très mal - et n’arrivait jamais à s’empêcher de donner un coup de main.
Ses pieds se mirent à la porter toute seule, s’enfonçant dans la flotte jusqu’à ses genoux pour traverser la petite branche d’eau. C’était pas grand chose, et l’eau était claire, elle y voyait bien. Et ça lui permet de détailler rapidement le corps tombé comme une pomme - visiblement d’une échelle qui heureusement n’avait rien.
C’était une femme, visiblement sonnée - et avec quelques années de plus qu’elle, il falait bien l’avouer. Elle était pâle comme un linge, comme si elle pendant de la corde depuis trop longtemps, et que le soleil l’avait délavé.

Tout va bien? Rien de cassé?” Basile ne sonnait pas trop pressante, mais un peu quand même. Heureusement que son visage sortait de l’eau. Elle avait l’air franchement mal en point, mais elle voulait savoir si elle avait un rien de conscience avant de l’aider à se relever.
Basile
⚘ Bouquet d'orties
Basile
Basile
Lun 11 Sep - 8:44
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Kat sort de l’inconscience aussi brutalement qu’elle y ait entrée. Tout à l’heure elle était sur l’échelle et maintenant elle est trempée, sur le dos, dans la rivière. Entre les deux, rien. Comme entre le moment où elle s’est endormie dans le caisson et le moment où elle s’est réveillée, alors que le monde changeait lentement autour d’elle. Plus rien n’est à sa place, de son point de vue tout a bougé trop vite. Là, c’est pareil : elle n’était pas censée être mouillée. Ni allongée, d’ailleurs. Le courant crée de petites vagues et son visage passe soudain sous la surface de l’eau. Par instinct, elle se redresse d’un coup, prend une inspiration et étend les bras ; l’un d’entre eux se cogne contre quelque chose et elle serre la main, par réflexe encore, sur une branche chaude couverte d’une texture douce.

Quoi ?

Comprenant le sens dans lequel le monde est censé être (la gravité tire vers le bas, Kat, c’est là qu’il faut mettre tes pieds), elle arrive à trouver le sol en s’appuyant sur le bras (c’est un bras, Kat, pas une branche) et remonte son regard vers un visage.

– Oh déesse Oshun, ne m’emportez pas encore, marmonne Kat en français.

La fièvre continue à la faire délirer. Les histoires des contes deviennent plus tangibles que la réalité, et il lui paraît évident que, debout dans une rivière au Brésil, la personne qui la retient ne peut être que la déesse des eaux douces. Certes, elle n’a pas son miroir ni ses bijoux d’or, mais ses yeux brillent d’éclats dorés et les conteurs ont toujours tendance à exagérer.

Qu’est-ce qu’elle est bête ; Oshun ne parle sûrement pas français. Alors les mots de portugais butent sur les lèvres de la vieille femme, qui essaie de faire une phrase compréhensible sans réussir à désembrouiller l’ordre dans lequel devraient être les mots. Elle ne sait même pas vraiment ce qu’elle veut dire ; qu’est-ce qu’on peut dire à une déesse qui vient peut-être nous sauver de la noyade, mais peut-être pas ? Est-ce qu’elle L’a vexée, en laissant entendre qu’Elle serait apparue pour la tuer, alors qu’Elle n’est peut-être que douceur et entraide, une main salvatrice pour la guider vers la rive ? Katell n’a rien à faire dans cette rivière, c’est sûr. Et puis elle a construit sa maison ici et peut-être qu’avant, elle aurait dû demander l’autorisation. Les sons qui passent ses lèvres ne sont que des mots décousus pêchés aléatoirement dans le courant de ses pensées ; même Angel n’y aurait rien compris.

C’est déjà trop d’efforts pour Katell ; elle n’a pas assez de force pour continuer à tenir debout avec la rivière qui la pousse de l’avant, alors elle trébuche et se retient en s’appuyant de son maigre poids sur la déesse.

Si elle survit, elle Lui offrira des bijoux pour complimenter Ses yeux. Elle les tressera avec des plantes, puis elle les mettra sur un petit bateau, une feuille plate sûrement, et elle regardera les flots l’emporter pour emmener son offrande jusqu’aux pieds de la Déesse.

Oui.

Ce sera beau.
Katell
⚘ Bouquet d'orties
Katell
Katell
Jeu 14 Sep - 20:24
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