Y fait froid là non ?
Il s'est encore fait piquer la couette par Marion c'est ça ?
Et puis pourquoi le lit est aussi dur ?
Ou alors il a juste encore dormi dans un caniveau.

Quelque chose lui perce la peau, des petites piqûres. Saletés de moustiques. Zach veut lever le bras pour se gratter, mais il lui semble lourd, comme s'il avait dormi dessus. Et puis il se cogne à un truc au dessus de lui. Aïe. Quel con met un toit à un caniveau.

Il grogne quand quelque chose fait du bruit, autour de lui. Un chuintement façon bouteille de coca avec trop de gaz dedans. C'est quoi ça ? Il essaie d'ouvrir les yeux, mais est juste accueilli par une lumière qui l'aveugle et le fait regretter aussitôt sa décision. Putain. Il est quelle heure ? Il grimace, se couvre les yeux, puis tente à nouveau de tendre la main. Rien, cette fois. Mais sur quoi il est allongé ? Le temps que ses yeux s'habituent, il essaie de toucher les alentours. C'est froid. C'est métallique, c'est...

Hey, une seconde.

Les sensations c'est... ouais. L'expérience. Ce truc débile de dormir dix ans pour une expérience. Il avait dit oui, histoire de laisser au monde le temps de l'oublier. Il se rappelait de son entrée en sommeil. Plus flippant que de tester une nouvelle substance.

Donc là c'est bon, on est dix ans après ? Pourquoi il entend personne autour, genre des bravo ou quoi ? Pour une fois qu'on pourrait le féliciter d'avoir dormi ? Il croit même entendre des piafs et un bruit vague d'eau. Quelqu'un a laissé un robinet couler.

Ses yeux s'habituent enfin. Il les entrouvre, essayant de chopper quelques infos en plus. Du métal en face, par terre, au dessus... et à droite, du ciel. Quoi ? Il grimace en se redressant, le corps rempli de fourmis. Et il observe. L'endroit est à moitié éboulé. Il était pas loin que son espèce de lit d'acier tombe. Par un de ses rares instincts de survie, il décide de se lever pour sortir du caisson. Pourquoi le sien est jeté en vrac alors que les autres sont alignés nickels contre les murs ?

Enfin, ça il s'en fout un peu.
Pourquoi y'a le putain d'extérieur là, devant ?
Ils sont où, les scientifiques ?

- Eh oh, y'a quelqu'un ?

Lance-t-il en polonais, puis en anglais. Sa voix lui semble rauque. Enfin, encore plus que d'habitude. C'est ça de trop dormir. Il a hâte de retrouver ses furets et les gars du groupe. Il se demande ce qu'ils sont devenus en dix ans. Un autre groupe ? Rangés dans un truc moins artistique ? Ca se trouve y'aura des gamins, ça serait drôle.
Faut juste qu'il comprenne ce qu'il s'est passé.

C'est peut-être un test pour voir s'ils sont en état. Genre voir s'ils peuvent marcher et tout tranquilles. Mais ça semble un poil dangereux quand même. Genre le vide là, il aurait pu y tomber s'il s'était levé littéralement du mauvais pied.

- Eh, c'est bon, j'suis bien réveillé, 'pouvez v'nir me chercher. Svp.

Toujours être poli face à des gens qui peuvent t'endormir en quelques secondes pendant dix ans, vieux proverbe.
Il fait quelques pas dans l'endroit et regarde les caissons. Y'en a d'ouverts, d'autres de fermés. Tout le monde se réveille pas en même temps ?
Meh. On les a pas oubliés, si ? Genre le premier réveillé a gagné, les autres on les laisse ?

Hey. Une seconde. Vu les conneries à la télé, c'était peut-être vraiment ça ? Genre une télé-réalité débile ? Il voyait bien le speech. « Ces gens ont été endormi et nous allons leur faire croire qu'ils le sont restés des années ! Voyez comment ils vont agir dans la nature en se croyant seuls au monde ! ». Mieux que Koh-Lanta, clairement.

Au moins, il se sent bien réveillé, maintenant.
Il marche un peu, jusqu'à remarquer un plan sur un mur et l'observer. Ouais. Donc clairement, il est dans un jeu. C'est quoi, une chasse au trésor ? Sûrement.
Ils sont bien gentils mais un peu de bouffe ce serait pas mal... Et puis de l'eau, tiens. C'est quoi dans les paniers ? Il se redresse et en attrape un. Des baies. Ah. Pas fou pour tenir longtemps mais c'est déjà ça. Il en pique une, puis deux, puis revient à la carte pour continuer de l'étudier comme s'il allait y déceler quelque chose qui le mènerait à la fin du jeu. Tout en grignotant les baies. C'est que ça a un goût de « reviens-y. »

Le seul truc à peu près bien, là, c'est qu'il est à l'ombre et protégé de ce con de soleil. Il faut pas qu'il se détache de cette idée de jeu, il voit que ça. Il a une boule dans le ventre. Il a peur. Il veut pas participer à un truc télé. Pour plein de raisons.
Mais ça vaut mieux que de chercher la moindre autre explication.

Cons de scientifiques.

Un truc parle derrière lui et Zach sursaute avant de se tourner.

- TOI t'es qui ?

Premier réflexe. En polonais. Il regarde la jeune femme face à lui un moment. Il l'écoute, regarde le panier, regarde la femme... et repose sagement sa prise par terre avec l'air d'un chien gaulé en pleine connerie. Elle a parlé anglais, alors il switche pour parler anglais aussi. Quasi sans accent, eh. La classe. Bon, ça s'entend quand même. Tant qu'elle le prend pas pour un russe il va rien dire si elle ricane.

- Ouaaaais ben j'pouvais pas savoir moi... j'dormais là, et bah comme d'hab quand tu t'lèves, t'as la dalle quoi ! Donc vu qu'ça pendait au plafond baah...

Il penche la tête quand il remarque le robot et le fixe en reculant clairement quand celui-ci approche pour aller inspecter son espèce de lit de fer en train de clignoter autant qu'un tel en fin de batterie.

- C'est quoi ce truc. Ça filme ?

Il laisse flotter un petit silence. Il comprend putain de rien, en fait. Mais bon, si elle est elle aussi coincée dans cet espèce de jeu bizarre et cruel, elle doit bien connaître des trucs. Faut pas qu'il s'en fasse une ennemie. Qui dit qu'ils sont pas dans Hunger Games, hein ? Nah, les copains ça fonctionne bien. Surtout quand on a le physique taillé dans l'épaisseur d'une alumette.

- Ah, du coup j'm'appelle Zach. J'vais t'aider, ok ? Pour m'excuser. Et parce que j'aime pas être tout seul. Tu m'laisses t'accompagner ? On va aller chercher d'autres baies et puis re-remplir tes rations de survie, ça t'va ?

Dit-il, peut-être un poil nerveux. Pas par la rencontre puisqu'il aime les gens, mais plutôt par tous les signaux qu'il reçoit à base de « c'est pas un jeu ». Son regard se promène sur pas mal d'éléments, cherchant où se poser. Finalement, il s'arrête sur la carte.

- Et puis ça c'est quoi ? Un indice façon carte de pirates ? Y'a un trésor au bout ?

Il s'en fout, s'il a l'air con. Il a l'habitude qu'on le regarde bizarre, t'façon.
D'ailleurs, eh. Elle a pas eu l'air de le reconnaître. Lui qui avait accepté cette idée de cryonie débile sur un semi-coup de tête histoire de se taper une sieste de dix ans avec l'espoir que le monde l'ait oublié entre temps, il était servi.

- Eh, dis, on est en quelle année ? 2047 nah ?

Sauf s'ils sait plus faire une addition. Il se perd encore dans sa tête pourtant plutôt vide de tout neurones. Il ressent juste toujours un besoin important de sociabilité et là, il a l'occasion de parler avec quelqu'un. Ou de tenir un monologue, peut-être. Il a que deux façons de sociabiliser, t'façon. Mourir dans un coin d'une conversation en écoutant juste, bien content d'être entouré, ou alors juste tenir une discussion sur à peu près n'importe quel sujet digne d'intérêt à ce moment là. Genre la grande migration des escargots et pourquoi le seigneur des anneaux y fait référence. Même si ça fait zéro sens. C'est marrant.

- Ils ont abusé sur l'emplacement d'ma cage là non ? J'aurais pu tomber de haut si j'm'étais levé du mauvais côté.